Commentaire d’œuvre 11 > Grand nu allongé – JACQUES STERNFELD

L’œuvre de Jacques Sternfeld, datée de 1925, est une huile sur toile représentant une figure nue, quasiment grandeur nature. Un cadre noir et doré, d’époque, stylisant des feuilles de laurier, l’entoure sobrement et élégamment.

Dans un intérieur suave, comme tenu secret, une femme allongée sur un divan se repose : elle est nue, réaliste et vêtue d’un seul collier de style art nouveau, elle laisse tomber sa tête coiffée de cheveux courts sur sa main gauche, et tient un petit éventail de l’autre. Tout respire la volupté, dans d’osés coloris verts et rouges, où la blancheur de la peau éclate entre les tissus, les coupes, les fleurs et les quelques objets meublant cette atmosphère japonisante, orientalisante, simple mais luxueuse…

La femme représentée sur cette toile, inconnue, non nommée, porte en elle plusieurs codes allant de la Renaissance aux années 30, rendant la toile aussi intrigante que classique. Si sa nudité, sans prétexte historique, peut rappeler l’audace risquée d’un Goya osant un nu effronté, elle n’en est pas provocante pour autant, et semble absorbée dans une rêverie qui n’inclue aucun spectateur, ou feint de ne pas le remarquer. Elle rappelle alors, de loin, la grande tradition des femmes allongées, plus habillées, défiant quant à elles encore le spectateur d’un regard. Notre modèle, ici, oscille entre un XIXème rêvé, un art nouveau porté en collier, et délaissé au profit d’un coupe courte, sans le corps androgyne de son époque, et laissant la porte ouverte aux nouvelles figures de Tamara de Lempicka.

Laure Saffroy-Lepesqueur

                                                                              

The work of Jacques Sternfeld, dated 1925, is an oil on canvas representing a naked figure, almost life size. A black and gilded frame, period, stylizing bay leaves, surrounds it soberly and elegantly.

In a suave interior, as if kept secret, a woman lying on a sofa rests: she is naked, realistic and dressed in a single Art Nouveau style necklace, she drops her head, with short hair, on her left hand, and holds a small fan of the other. Everything exudes voluptuousness, in audacious green and red colours, where the whiteness of the skin bursts between the fabrics, cuts, flowers and the few objects that furnish this Japanese atmosphere, orientalizing, simple but luxurious…

The woman depicted on this canvas, unknown, unnamed, carries in herself several codes ranging from the Renaissance to the 1930s, making the canvas as intriguing as classic. If his nudity, without historical pretext, can remind the risky audacity of a Goya daring a brazen nude, she is not provocative at all, and seems absorbed in a reverie that does not include any spectator, or pretends not to notice it. She reminds the great tradition of women lying down, more dressed, for their part still defying the spectator with a look. Our model, here, oscillates between a dreamed nineteenth, an art nouveau worn in necklace, and abandoned in favor of a short cut, without the androgynous body of his time, and leaving the door open to the figures of Tamara of Lempicka.

Laure Saffroy-Lepesqueur